Comprendre > Approfondir > Planètes IV
En astrophysique, on appelle "improprement" champ magnétique la densité de flux magnétique ou induction magnétique, notée B (Vecteur) et exprimée en Teslas. Un champ magnétique dipolaire peut être assimilé au champ créé par un aimant. Son intensité varie en fonction de la distance r à son centre, suivant la loi :
B (r) = Bo (Rp/r)3 où Bo est l'intensité du champ magnétique à la surface de la planète, c'est-à-dire où r =Rp (le rayon de la planète).
Un champ magnétique exerce une action mécanique sur des charges (négatives et positives) en mouvement ; la force F (en Newtons) exercée par une charge q (en Coulombs) de vitesse v (en mètres/seconde) et placée dans un champ magnétique B (en Teslas) est :
F = q v x B (où x désigne le produit vectoriel)
Les champs magnétiques présents dans le système solaire exercent donc une action sur les particules chargées des plasmas. Un plasma, aussi appelé "4ème état de la matière", est un gaz qui, suffisamment chauffé, devient partiellement ou totalement ionisé, c'est-à-dire composé d'électrons, de protons et d'ions positifs (atomes ayant perdu un ou plusieurs électrons) ; à grande échelle, il est globalement électriquement neutre. La majorité de la matière connue dans l'Univers est sous forme de plasma.
La magnétosphère d'un astre est la zone d'influence "dominante" de son champ magnétique.
Quand le champ magnétique global du Soleil, approximativement dipolaire (dit aussi "poloïdal"), est assez faible, les lignes de force du champ magnétique, qui sont le long des méridiens, sont entraînées par la matière subissant la rotation différentielle et sont étirées jusqu'à devenir presque parallèles à l'équateur solaire : le champ magnétique devient "toroïdal" ; on pense que ce sont les lignes de force émergeant de la zone convective qui donnent naissance aux paires de taches solaires, qui sont de longitudes différentes, de latitudes voisines et de polarités magnétiques opposées (les taches dites de "tête" sont en avant par rapport aux taches de queue dans la rotation du Soleil) ; des boucles magnétiques sont observées jusque dans la couronne, au-dessus des régions actives ; quand la tension des lignes de champ est trop forte, elles se rompent et un nouveau champ dipolaire se forme, mais avec des polarités opposées. Ainsi, d'un cycle d'activité de 11 ans (en moyenne) au suivant, les polarités des pôles magnétiques du Soleil s'inversent, et la polarité des taches de tête, qui est la même pour toutes les taches de tête dans un même hémisphère, au cours d'un cycle, s'inverse au cycle suivant ; il en va de même pour les taches de queue. Un cycle d'activité magnétique dure donc environ 22 ans. L'intensité du champ magnétique dans les taches peut atteindre 0.5 Teslas, soit environ 1000 fois l'intensité du champ magnétique "moyen" à la "surface" du Soleil calme. Les taches apparaissent sombres car elles sont de température inférieure à celle de la photosphère environnante (plus brillante) ; en effet, le champ magnétique plus intense dans les taches "bloque" l'apport de matière chaude issue de l'intérieur.
Toutes les lignes de force du champ magnétique solaire qui sortent du pôle nord ne rejoignent pas le pôle sud pour former une boucle fermée ; en effet, il existe des lignes de champ de direction radiale, dites ouvertes, qui forment les trous coronaux et permettent aux particules de s'échapper du Soleil. Le vent solaire entraîne avec lui une partie infime du champ magnétique solaire, qui forme le champ magnétique interplanétaire, dont les lignes de force sont en spirale "d'Archimède", et font, au niveau de l'orbite de la Terre, un angle de 45° avec la direction Soleil-Terre. La magnétosphère du Soleil s'appelle l'héliosphère ; son influence s'étend au-delà de l'orbite de Pluton, jusqu'à 100-150 unités astronomiques (1 u.a. = distance Soleil-Terre = 149 millions de km).
On sait aussi que lorsque les comètes s'approchent à moins de 3 ua du Soleil, elles développent souvent deux queues, l'une de poussières, alignée le long de son orbite, et l'autre de gaz ionisé, alignée dans la direction opposée au Soleil.
La Terre possède aussi un champ magnétique dipolaire (en première approximation) dont l'axe fait un angle de 11° avec l'axe de rotation de la Terre : le pôle magnétique Sud (respectivement Nord) de ce dipôle est à environ 11° du pôle géographique Nord (respectivement Sud). On pense que le champ magnétique de la Terre est produit par effet dynamo, c'est-à-dire par un courant électrique circulant dans le noyau terrestre qui est liquide ; cependant, on comprend mal comment peut s'opérer la séparation des charges négatives et positives nécessaires à l'établissement du courant électrique invoqué.
La Terre garde une trace des variations de l'intensité et de la direction de son champ magnétique dans le passé : pour les derniers 160 millions d'années, on estime que l'intensité a tantôt augmenté, tantôt diminué, et que les pôles magnétiques nord et sud s'inversent en moyenne tous les quelques 100000 ans environ, mais la dernière inversion a eu lieu il y a 780000 ans ; une inversion durerait quelques 1000 ans et fait passer le champ magnétique terrestre par une intensité plus faible qu'actuellement avec des pôles magnétiques multiples. Actuellement, l'intensité du champ magnétique terrestre décroît.
Le champ magnétique terrestre agit comme un bouclier de protection contre le vent solaire : la magnétosphère de la Terre fait dévier une partie des particules chargées du vent solaire, qui sont nocives pour la vie. La magnétosphère de la Terre délimite la zone où son champ magnétique domine celui du vent solaire (cf. figure). La frontière délimitant la magnétosphère s'appelle la magnétopause. La magnétosphère est comprimée par la pression du vent solaire du côté "jour" avec une taille d'une dizaine de rayons terrestres, et s'étend environ dix fois plus loin du côté nuit ; le vent solaire étant supersonique, une onde de choc se forme du côté jour en avant de la magnétopause ; la magnétogaine (en jaune) est la zone située entre l'onde de choc et la magnétopause. La région "cusp" désigne l'un des deux cornets polaires, par lesquels des particules solaires atteignent l'atmosphère terrestre. La magnétosphère est remplie de plasma issu du vent solaire et de l'ionosphère terrestre, qui est la couche la plus élevée de l'atmosphère terrestre, située au-dessus de l'atmosphère neutre, entre 80 et 1000 km d'altitude. La plasmasphère (en bleu), qui prolonge l'ionosphère, contient du plasma froid qui tourne avec la Terre. Les ceintures de radiation (dites "de van Allen") sont deux "anneaux" entourant l'équateur magnétique, dans lesquels s'accumulent des particules chargées. Dans la queue magnétosphérique, le feuillet de plasma (en vert) est formé de plasma chaud et sépare des régions dont les champs magnétiques sont de sens opposés.
La précipitation de particules chargées dans l'atmosphère de la Terre entraîne des collisions avec les atomes qui, lorsqu'ils se désexcitent, produisent des raies spectrales caractéristiques (verte pour l'oxygène atomique, rouge, bleue et violette pour l'azote diatomique) : ce sont les superbes aurores polaires (boréales dans l'hémisphère nord, australes dans l'hémisphère sud), que l'on observe généralement aux hautes latitudes, mais parfois en France et même jusqu'à 35° de latitude.
Les variations de pression du vent solaire entraînent des perturbations du champ magnétique terrestre appelées orages géomagnétiques.
Le champ magnétique des autres planètes magnétisées est aussi dipolaire en première approximation. L'intensité du champ magnétique de Mercure est estimée à seulement 1% de celle du champ terrestre. Les planètes Vénus, Mars et Pluton n'ont pas de champ magnétique notable, alors que les quatre planètes géantes, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune, ont un champ magnétique intense.
L'interaction des particules chargées avec le champ magnétique des planètes magnétisées est source d'émissions électromagnétiques observées aux longueurs d'onde radio.
Jupiter, qui est la planète la plus grosse et la plus massive du système solaire, est aussi celle qui possède le champ magnétique le plus intense. Elle est ainsi la seule dont les émissions radio aurorales descendent à des longueurs d'onde suffisamment basses (environ 7.5 m) pour traverser l'ionosphère terrestre (qui réfléchit les ondes de longueur d'onde > 30-100 m) et être observables depuis le sol terrestre. Certaines des lignes de champ joviennes étant traversées par le satellite Io - dont le volcanisme actif forme un tore de plasma dans le plan de l'équateur magnétique de Jupiter - un courant électrique est engendré, et on observe un renforcement des émissions radio dans certaines configurations de Jupiter et Io par rapport à la Terre. Des mesures de la sonde Galileo indiquent que Io et Ganymède auraient leur propre champ magnétique, à l'intérieur du champ jovien.
Terre |
Jupiter | Saturne | Uranus | Neptune | |
---|---|---|---|---|---|
Inclinaison de l'axe de rotation (°) (1) | 23 | 3 | 27 | 98 | 30 |
Inclinaison de l'axe magnétique (°) (1) | 12 | -10 | 0 | -59 | -47 |
Décalage de l'axe magnétique (%) (2) | 8 | 10 | 5 | 31 | 55 |
Moment magnétique (Moment magnétique terrestre » 8.1015 Weber.mètre) | 1 | 20000 | 600 | 50 | 25 |
Champ dipolaire à la surface, à l'équateur (10-4 T) | 0.31 | 4.25 | 0.22 | 0.23 | 0.14 |
Taille de la magnétosphère (Rayonplanète) | 11 | 50-100 | 16-22 | 18 | 23-26 |
Notes :
(1) Inclinaison par rapport à la perpendiculaire au plan de
l'écliptique (plan de l'orbite de la Terre autour du Soleil, correspondant
à une ligne horizontale sur le schéma).
(2) Décalage du dipôle par rapport au centre de la planète.
Crédit : M. Abada-Simon/Arpèges/observatoire de Paris